Journée internationale des femmes
Je rentre à la maison sur les coups de minuit. À l’entrée de l’immeuble, j’aperçois un sac de voyage. Oublié ? ... Puis je remarque une femme, sur ma droite.
Je la reconnais, elle habite dans le même immeuble. La cinquantaine peut-être, petite, menue, les cheveux grisonnants, permanentés. Elle milite pour le partie de la gauche ; je l’ai vu tenir un stand au moment des élections.
Elle renifle, semble vouloir se rencogner dans son coin. Elle a une grosse bosse sur la tempe droite. Elle s’essuie le visage avec son foulard, la moitié du visage est rougeâtre, du sang a séché dans ses cheveux.
– Mais qu’est-ce qui vous est arrivée ?
– Moi ? Rien ...
– Mais si, vous saignez !
– Non, ça va, j’attends mon copain.
– ... Vous voulez rentrez ?
– Non, j’attends mon copain, tout va bien !
Je ne suis pas convaincue, mais je rentre et monte à mon appartement.
Elle habite avec un homme, petit aussi, mais rondelet. Le « copain » dont elle parle doit être un autre homme. Peut-être qu’elle lui a avoué qu’elle voulait le quitter, il l’a frappée et elle s’est heurté la tête en tombant ... J’ai du mal à croire qu’il puisse frapper une femme, mais visiblement ... Le sac de voyage dans l’entrée est certainement le sien et elle attend qu’on vienne la chercher ...
J’ai longtemps guetté le bruit d’une voiture. En même temps, la mauvaise conscience commençait à me gagner ... Peut-être aurais-je dû appeler la police ? Mais elle refusait ostentatoirement mon aide. Ai-je le droit dans ces conditions de m’immiscer dans sa vie ? Elle ne voulait pas qu’on la remarque. Je la comprends presque bien qu’il me soit difficile de m’imaginer comment je réagirais dans une situation semblable. Il est possible qu’on ressente de la honte. Elle a au moins eu la force de faire ses valises et de partir. J’espère qu’elle a aussi eu le courage d’aller porter plainte à la police.
***
La journée internationale des femmes n’est pas un jour de fête au cours duquel les hommes offrent des fleurs. Pour moi, c’est un jour pour soulever les problèmes de la condition des femmes dans le monde entier. Je me sens priviligiée d’habiter en Europe, qui plus est en Europe du Nord, où l’on se félicite tant de l’égalité des sexes. Et bien sûr, certaines régions du monde ont encore beaucoup de progrès à faire. Je n’ai pas à me plaindre. Mais même en Suède, il y encore du travail à faire ...